Nov 10, 2005

The Sky is the Limit ! [Thorong La 5416m]

[Phedi 4400m - Thorong La 5416m - Muktinath 3800m]

2h30 le réveil sonne. Nous avons mal dormi, et pourtant, le Thorong La nous attend ! Par contre, bonne nouvelle : Guillaume va mieux. Les sacs étaient prêts la veille, en prévision, et nos frontales sont prêtes également. Il ne nous reste plus qu'à se mettre quelque chose dans l'estomac. En théorie, nous devrions passer le col vers 9h, c'est-à-dire que nous marcherons au moins 3h dans le noir. L'ascension commence après deux toasts enfilés rapidement. Nous demarrons tous en file, avec des porteurs sans frontale entrecalés entre nous. C'est raide et ce au moins jusque High Camp, à 1h d'ici. La montée est régulière et nous atteignons la première étape, High Camp, sans trop de problèmes. On commence à marcher dans la neige, sous un ciel étoilé splendide. A ceci font suite quelques grosses montées dans la neige, qui finissent de me frigorifier les mains. Un petit chalet nous accueille afin de nous mettre à l'abri du vent temporairement. Nous sommes à 5000m.

Suké nous presse et je ressors du chalet tout autant congelée. Ca m'est "fatal" : l'effort de la montée, le repos temporaire et le froid qui gagne me font tourner la tête, d'autant plus que tout effort se fait sentir à 5000m ! Je n'arrive plus à marcher. Suké me porte mon sac mais ça n'aide pas. Je suis toujours incapable de marcher et j'ai les mains gelées. Une idée me passe par la tête : si je ne suis pas capable de poursuivre, avec ces vertiges je ne suis pas non plus capable de redescendre... oups... Ne voyant pas de solution à mon problème, je tente de marcher en rapprochant le plus possible mon coeur de la tête (ou l'inverse) histoire qu'il arrête de pomper et que les vertiges cessent. Au fur et à mesure de la montée, ça va de mieux en mieux. Je prie pour que cela dure jusqu'en haut. Je fais toute l'ascension de cette manière, les yeux rivés sur mes pas, Suké derrière moi et Guillaume juste après. Le vent s'est levé. Je me recroqueville dans mon gore-tex et marche les mains dans le dos, afin de les préserver. Il faut dire que j'aurais du emporter mes gants de ski alpin plutôt que ces petits gants maigrichons avec lesquels je fais du ski de fond et du vtt ! Après m'être injuriée intérieurement plusieurs heures de marche durant, dont une dans un vent glacial, nous voilà au col ! Je ne prends même pas la peine de regarder autour de moi et rentre illico dans un chalet qui fait office de "tea-room", où deux dizaines de personnes sont tassées, grelotantes pour certaines, à boire du thé. Le thé serait même vendu à 10 euros que j'en commanderais ! Tout mon corps tremble et il me faut deux thés pour venir à bout de mes tremblements. Au thé, nous ajoutons des barres de céréales pour se refaire une santé, car pour l'heure, je suis HS ! Il va pourtant falloir redescendre le col !

Après plusieurs dizaines de minutes passées là, nous nous osons à ressortir, poussés par Suké, qui a peur que le vent ne redouble. Nous prenons une ou deux photos au sommet puis nous nous dirigeons rapidement vers la descente. C'est là que nous réalisons que nous sommes en haut. Waw ! Nous sommes à 5416m, au beau milieu de la chaîne himalayenne... Que doivent ressentir les grands himalayistes à plus de 8000m ?! C'est grisant, en tout cas. Mais nous sommes vite rappelés à la réalité : il y a un vent à décorner les boeufs et il faut se dépêcher un peu ! La descente est plus facile que la montée et au bout d'un moment, nous sommes hors de portée du vent. Ca nous laisse le temps d'admirer le paysage et de faire quelques photos. C'est très glissant, il faut faire attention. Après de nombreuses chutes sur la neige glacée par le vent (le guide n'échappe pas à la règle) nous optons pour la poudreuse. Ce n'est pas mieux : en fait, soit on a de la neige jusqu'aux "oreilles" et c'est hyper physique de descendre, soit on chute tous les deux mètres à cause de la glace... Nous optons tout de même pour la poudreuse car il y en a marre de tomber, franchement marre ! Nous sortons les bâtons pour nous aider mais c'est très physique : la neige est durcie par le vent et le froid par endroits et s'effondre sous vos pieds à d'autres. On s'arrête tous les mètres pour se reposer, et j'essaie même une technique peu catholique : la descente sur les fesses. Mais c'est raide et ça descend vite, ce qui n'est pas très confortable. Ayant peur pour mon pantalon, je reprends la technique classique, déçue de ne pas avoir trouvé d'autre issue.

Nous sommes crevés, trempés et nous ne savons pas combien de kilomètres il reste à faire. Ca n'en finit pas. Je n'ai plus de cuisses. Les porteurs sont bien embêtés sur ce terrain peu pratiquable avec leurs charges et leurs chaussures peu adaptées. Pourtant, à notre étonnement, ils s'en sortent (avec des chutes malgré tout). Le ras le bol gagne quand on arrive finalement au tea-room où nous attend Suké. J'ôte mes chaussures pour quelques dizaines de minutes seulement, histoire de quitter mes chaussettes mouillées avant de continuer à marcher. Je prends également une dernière petite photo de Guillaume, sur laquelle on lit la fatigue ! Suké nous annonce que nous avons encore 1h de marche jusqu'à Muktinath et que nous nous y rendrons avant de manger. C'est difficile à avaler. L'étape vers Muktinath est elle aussi interminable, et c'est complètement épuisés que nous atteignons notre lodge. Nous avons l'impression de rejoindre la civilisation, et croisons quelques têtes connues de trekkeurs rincés, tout comme nous. Une bonne douche chaude nous remet un peu d'aplomb, même si la propreté des lieux nous en gâche un peu le plaisir. Ca y est, nous sommes soulagés : le gros du trek est réussi, et les étapes qu'il nous reste ne sont pas exigentes d'un point de vue physique. Nous devrions boucler notre trek sans problème.

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