Oct 29, 2009

Nepal 2009 - Sur l'inconfort

“Etrange pratique que le trek”, nous rappelle sans cesse notre entourage, a l’ecoute de nos recits de voyages. Si ces derniers relatent a l’evidence la splendeur des paysages himalayens, nous nous etendons facilement sur les details qui font l’aventure, a savoir les petits soucis quotidiens auxquels nous sommes confrontes.

Celui qui m’indispose personnellement le plus est l’inconfort du aux conditions d’hygiene. C’est a ce titre que la description de celles-ci ne manquent pas dans mes recits, alors que Guillaume, lui, s’en trouve largement moins incommode.

Une autre source d’inconfort a trait a l’hebergement : toujours rustique et etroit, il necessite une bonne organisation des sacs pour s’y mouvoir facilement. Les lodges restent cependant un must par rapport au camping, auquel on ne cede qu’en cas de pure necessite, tant rester a quatre pattes pendant 15 jours dans une tente froide qu’il faut monter a la fin de chaque journee de marche, ajoute a la debauche d’energie que nous tentons au contraire vainement de limiter.

Le froid fait incontestablement partie de l’inconfort du trek, celui-ci etant plus vif dans certaines regions. Il necessite une bonne “preparation de sac” avant de partir, et surtout une quete sceptique des informations meteorologiques glanees sur le web. Les agences nepalaises ont en effet une notion toute relative des temperatures, ce qui nous valu lors d’un trek des previsions minimales a +5 degres contre -20 degres en realite ! Le froid necessite aussi un peu d’experience, le trekkeur sachant qu’il vaut mieux ne pas se laisser refroidir plutot que de penser qu’il va pouvoir se rechauffer par la suite. Il sait egalement qu’une douche prise après le coucher du soleil equivaut a des heures de tentatives de rechauffement infructueuses, si ce n’est a l’aide d’une bonne soupe chaude ou d’un poele a bois. Les sacs de couchage et autres vetements chauds doivent etre choisis en fonction de la destination, meme au sein d’un meme pays, chacune d’entre elles pouvant offrir des conditions tres differentes. Enfin, il faut savoir que le fond de l’air est toujours frais au Nepal, malgre un soleil souvent present, ce qui donne des differences de temperature impressionnantes entre les zones exposees au soleil ou non. Sur les hauts sommets, aucune astuce n’est de mise, autre que celle de s’emmitouffler et de prevoir autant de materiel pour le froid (polaires-duvets) que pour le vent (gore-tex).

Quand on parle d’inconfort, on ne peut pas ne pas citer l’altitude elevee, qui tend a faire ressentir le froid plus vivement, et qui essouffle plus que de raison. L’altitude impose une discipline au trekkeur qui, s’il ne la respecte pas, se voit severement sanctionne : 500m de denivelees par jour maximum au-dessus de 3000m, marcher lentement, ne pas manger gras (au-dessus de 3500m, le corps ne digere pas correctement la graisse), boire beaucoup – du the et de la soupe a l’ail pour bien faire –, ne pas boire d’alcool, et preferer la nourriture energetique pour les longues journees de marche en altitude, qui valent le double a altitude zero !
L’altitude necessite une vigilance de tous les instants de la part du trekkeur : il doit preter attention a l’apparition de symptomes, qui pourraient non seulement avoir raison de son trek, mais egalement avoir raison de lui.

Les moyens de transport pour se rendre en trek sont egalement particulierement inconfortables. Souvent secoues et serres comme des sardines, seul l’horizon du trek permet aux trekkeurs d’oublier les conditions du voyage, qui peut meme s’averer catastrophique s’il est cumule avec des problemes intestinaux (ce qui n’est pas rare)… Ceci dit, le voyage s’avere finalement bien souvent plus “insecure”qu’inconfortable.

Ces differents points ne seraient rien s’ils ne s’additionnaient pas !!! Pourquoi alors, faire du trek un objectif de vacances ? Certainement parce qu’au-dela de l’ascension, la confrontation de nos petites natures a ce qu’il en est de la vie departie du confort offert par la civilisation occidentale, permet un retour a l’essentiel auquel notre culture ne donne pas acces. Nos vies reglees par le travail nous rendent aveugles a notre condition humaine, ce a quoi l’aventure himalayenne rend vie pour quelques semaines, epure d’un quotidien qui fait toc.

Loin de la pseudo-liberte recherchée par les groupes hippies, ce retour sur soi se veut realiste et pleinement conscient : il ne s’agit pas de trouver une terre ideale ailleurs, mais bien de malmener nos certitudes d’occidentaux esclaves de leur confort post-moderniste. Persuades que la vie quotidienne reste routiniere dans l’himalaya comme en Belgique, nous ne faisons pas de cette quete un ideal ni un credo, mais un temps necessaire dans une annee consacree a d’autres quetes. Ainsi, si dans la gouvernance d’un pays, l’opposition permet a la majorite de dialetiser les decisions, le trek agit tel un contre-pouvoir face au pouvoir en place : il le force a s’assouplir, a argumenter, a negocier, a ne pas prendre ce qui emane de lui comme seule et unique maniere de faire.

Pour conclure, je dirai que nous avons souvent honte de notre difficulte face a cet inconfort, alors que les nepalais s’en plaignent si rarement. Ils n’estiment pas leurs conditions de vie malheureuses et ils ne “survivent” pas : ils vivent a travers le lien social et les religions, dont leur culture est particulierement impregnee.

Et s’ils ont fait des chemins de trek leur plus grande source de revenus, c’est bien parce que c’est le sens de l’accueil qui fait vivre ces peuples si attachants. Pour le sens du confort, ils verront plus tard…

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