Aug 31, 2006

Engagez-vous, ils disaient ! Engagez-vous ! [Wanla High-Sumda Doksa via Kongskil La 4950m.]

La nuit n'est pas si bonne que cela en ce qui me concerne... Le manque de confort et l'altitude me rendent le sommeil difficile, et ce matin lorsqu'on se lève, il pleut ! Nous devons, de surcoît, rattrapper les deux heures de marche perdues la veille. Nous ne nous rendons pas tellement compte de ce que cela signifie pour l'instant. Nous marchons sous une fine pluie qui ne nous oblige pas à mettre les capes. Par contre, elle nous mouille petit à petit sans que nous ne nous en rendions compte. Après Hinju, nous visitons rapidement une Gompa et l'école du village, avant de poursuivre notre marche.


La fatigue accumulée cette nuit n'est pas favorable et j'avance assez lentement, tout comme Guillaume. Nous entamons alors une longue montée progressive mais suffisante pour nous obliger à puiser dans le peu de forces que nous avons. Nous remontons la rivière pendant de longues heures avant de manger rapidement pour ne pas nous refroidir. Nous poursuivons ensuite notre marche difficile, toujours sous la pluie.


Didier est soudainement affecté par une diarrhée handicapante, qui le suivra jusqu'au petit rédillon qui nous semblait être le fameux col... et qui s'avère en fait être le début d'une longue marche très raide vers les 4950m. que nous avons à grimper. Déception ! Le moral en prend un fameux coup car en ce qui me concerne, je suis H.S. et la côte s'avère raide. C'est là que l'enfer commence, alors que nous pensions être quittes de cette étape. La pluie augmente et nous enfilons enfin nos capes, sauf que nous sommes très humides en-dessous. Il y a du vent, il fait froid et la boue s'accumule sur le chemin. Nous faisons deux pas en avant et trois en arrière à cause de cette boue glissante. Je n'arrive plus à avancer et je m'arrête tous les trois pas pour reprendre mon souffle, mais surtout parce que je me sens très faible et je ne tiens quasiment plus debout. Pendant ce temps, Guillaume, lui, s'est refait une santé et va un peu mieux.

Le chemin est étroit et glissant. Les bords nous laissent découvrir une pente assez vertigineuse. Il ne s'agit pas de glisser ! Mais c'est franchement le moindre de mes soucis. Pour l'heure, je suis congelée, mouillée jusqu'aux os et je n'arrive plus à avancer. Chaque zigzag est une victoire et une déception, car si ça se rapproche forcément du but, par contre, ça m'indique souvent que le "Pass" n'est pas si proche que je l'imaginais. J'ai la nausée, je me sens mal. Une idée me passe par la tête mais je me garde bien de la partager avec Guillaume, qui me dira par la suite qu'il pensait à la même chose pendant l'ascension : on va crever là ! Une fois cette idée bien ancrée dans ma tête, il me faut trouver une solution. Je fais le vide et je m'efforce de ne plus m'arrêter, un me dictant un rythme : pied droit, pied gauche, pied droit, pied gauche. Je me traîne de cette façon en me répétant ce petit laïus pendant un temps qui me paraît infini.

Pour la cinquantième fois aujourd'hui, je crois apercevoir le col. Cette fois, c'est bien lui. Alleluia ! Il ne reste plus qu'à descendre la very steep and difficult descent indiquée dans le descriptif. Mais ça ne me fait absolument pas peur. Je suis en haut, je suis vivante ! La pluie se déchaîne mais I don't care je descends en priant pour arriver le plus rapidement possible au campement.

Nous sommes rassurés pour aujourd'hui mais pas pour la suite : nous sommes trempés, nos affaires aussi, dont nos matelas. Nous mangeons rapidement en tentant de nous réchauffer, ce qui est difficile vu qu'il continue à pleuvoir. La nuit ne s'annonce pas réparatrice, d'autant plus que mes intestins n'ont pas supporté la journée...


Après cette journée de souffrance, nous continuons dans la même lignée : la nuit, je dois me relever, me rhabiller, prendre ma frontale, affronter la neige fondante qui tombe pour me rendre jusqu'au trou qui fait office de toilette. Je dors très mal, avec, de sucroît, une inquiétude qui monte : la pluie ne s'arrête pas ! Tout cela pourrait s'avérer très drôle, finalement, si nous avions un peu de recul : il faut m'imaginer, le pantalon retroussé sur les genoux pour éviter d'en mouiller le bas avec la pluie, le bas n'étant pas protégé par la magnifique cape qui me fait ressembler à un fantôme, courrir avec une lampe sur la tpete et un rouleau de PQ dans la main droite, vers une "tente toilettes" qui flotte au vent, donnant l'impression qu'elle va s'envoler dès que vous aurez commencé vos petites affaires. Tout cela en pleine nuit au bout du monde ! Engagez-vous, ils disaient. Engagez-vous !

No comments: